BUDAPEST — L’Union européenne a fait savoir qu’elle allait conférer le prestigieux statut de patrimoine européen à la synagogue de la rue Dohany de Budapest, qui sera le seul lieu de culte juif à figurer sur cette liste.
La commission européenne, l’instance exécutive du bloc de nations, a annoncé mardi dans un communiqué que cette synagogue ancienne de 158 ans « qui est la plus grande d’Europe et la deuxième plus grande dans le monde sera ajoutée l’année prochaine à la liste des 38 sites de patrimoine, dont font partie l’église Javorca de Slovénie, Fort Cadine en Italie, et le village de Schengen au Luxembourg, où les leaders de l’Union européenne ont établi un traité permettant les mouvements transfrontaliers et de libre-échange ».
« Le complexe de la synagogue de la rue Dohány est un symbole d’intégration, de mémoire et d’ouverture au dialogue », a expliqué la commission en annonçant l’entrée du lieu de culte sur la liste qui célèbre les endroits qui, selon elle, « symbolisent les idéaux, les valeurs, l’histoire et l’intégration » européens.
Sur cette liste, figurent également deux anciens camps de concentration : Westerbork aux Pays-Bas et le complexe du camp de concentration de Natzweiler, en France et en Allemagne.
La synagogue de Budapest est considérée comme le berceau du mouvement néologue du judaïsme en Europe centrale, qui est similaire aux mouvements conservateur ou Massorti. Elle est conçue sur le modèle architectural intérieure d’une église. En effet, la plateforme de prière – ou bimah – est située à l’extrémité de la salle et non en son centre, comme c’était l’usage en 1850, lorsque le bâtiment a été inauguré.
D’une capacité de 3 000 personnes, la synagogue de la rue Dohany présente également trois rangs de bancs qui évoquent une église. Les femmes, pendant les grandes fêtes, prennent place dans la section qui leur est réservée, au deuxième étage, mais elles rejoignent les hommes, en bas, lors du Shabbat. La synagogue est utilisée comme lieu de culte seulement pendant l’été. Les prières, pendant l’hiver, sont organisées dans une synagogue adjacente et plus petite, plus facile et moins onéreuse à chauffer.
Des milliers de touristes visitent chaque mois la synagogue lors de visites guidées en plusieurs langues. C’est Mazsihisz, la fédération des communautés juives qui est chargé de sa gestion.
La synagogue de la rue Dohany dispose d’une fosse commune qui a recueilli les restes d’au moins 2 281 personnes dans son jardin intérieur, ce qui est inhabituel pour un lieu de prière. En effet, les synagogues sont séparées des lieux d’inhumation en raison de règles religieuses sur la pureté. Les défunts, dont l’identité est inconnue, pour la plupart, y ont été placés durant l’hiver 1944, lorsque la synagogue faisait partie du ghetto juif.
Le complexe de la synagogue contient également une stèle symbolique à la mémoire de Raoul Wallenberg, diplomate suédois disparu, qui avait donné des passeports diplomatiques à des milliers de Juifs hongrois, leur sauvant la vie. Ils avaient ainsi pu les utiliser pour fuir le pays alors qu’il était sous le contrôle des nazis et de leurs collaborateurs locaux.